La drogue, l’autre source de financement des guerres (2)

Publié le par Denis-Zodo

  Il n’y a pas que le diamant qui soit à l’origine des transactions de guerres.
Selon les Nations-Unies, la multiplication des conflits en Afrique a non seulement favorisé les trafics d’armes et de matières précieuses mais aussi celui des drogues illicites produites localement  comme le cannabis ou en transit, comme la cocaïne provenant d’Amérique latine ou l’héroïne des champs de pavot asiatiques. On le voit, la drogue a souvent financé l’achat d’armes ou permis de « tenir » des combattants de plus en plus jeunes, comme cela a été le cas au Liberia ou en Somalie. Le continent n’a jamais été un producteur d’héroïne ou de cocaïne. Selon un rapport de l’ONU, les Africains ont toujours produit et consommé du cannabis, et récemment davantage de psychotropes et de médicaments.

Pour ces raisons, l’Afrique est aujourd’hui la  plaque tournante mondiale du trafic de drogue, selon des sources concordantes. On le sait, l’héroïne d’Afghanistan transite par l’Afrique à destination de l’Amérique du Nord.

En effet, les routes du trafic de drogue passent de plus en plus par le continent africain. Ainsi, «l’Afrique est la cible des trafiquants de cocaïne qui viennent de l’ouest (Colombie) et des trafiquants d’héroïne qui viennent de l’est (Afghanistan)», comme le relève Antonio Maria Costa de l’ONUDC.
  La croissance de ce trafic touche surtout le golfe de Guinée et la côte africaine, à la hauteur du Cap Vert. La résine de cannabis provient toujours essentiellement d’Afrique du Nord, même avec  la forte  réduction de sa production à 1.070 tonnes en 2005 (contre 3.070 tonnes seulement 2 ans auparavant).  Le Maroc reste premier producteur de haschich, et les  surfaces cultivées y sont passées de 134.000 hectares en 2003 à 76.400 hectares en 2005.
Dans les conflits, les drogues font désormais partie d'une dynamique régionale fondée sur les armes et les marchandises volées, en particulier les automobiles et le bétail. Le trafic se développe dans la région en se rattachant à des activités prédatrices illicites très localisées, dont l'exécution repose souvent sur l'emploi des armes. Comme on le sait, en s'ouvrant au monde au cours des années 1990, l'Afrique australe  pacifiée par exemple, est devenue une plaque tournante et un marché pour les flux internationaux de drogues illégales, cocaïne, héroïne, hachisch et "drogues de boîtes de nuit" ("club drugs").
Ainsi, une pratique apparue initialement à la fin des années 1980, s'est considérablement étendue depuis le milieu des années 1990 : le troc de véhicules ou de bétail volés contre de la drogue ou des armes.

Le trafic d’armes et les activités mercenaires en Afrique sont soutenus par certains  gouvernements  et par des entreprises d’exploitation locale.

Ainsi, dans les crises en Afrique occidentale, Charles Taylor, ex-Président du Liberia  et les sociétés d’exploitation forestière ont été constamment cités.
En l’an 2000, Charles Taylor, alors Président du Liberia, a été officiellement accusé par l’ONU de soutenir les insurgés en fournissant des armes et un entraînement au FRU en échange de diamants. Taylor a démissionné de ses fonctions de Président du Liberia en août 2003 dans le cadre d’un accord de paix négocié internationalement pour mettre un terme à ses actions. Exilé au Nigeria en 2003, Taylor a finalement été transféré aux Pays-Bas où il comparaît devant la Cour pénale internationale de La Haye.
Un peu après, certains Chefs d’Etat  ont même perdu leur vie dans les transactions avec les narcotrafiquants véreux, dans le cadre d’un règlement de compte.
Comme on le voit, il serait inutile de décrire toutes les transactions menées en échange des armes ou de la drogue, mais plutôt, chercher l’origine des armes.


Quelle est la provenance probable des armes illégales ?

Après la fin de la Guerre froide et de l'effondrement des systèmes étatiques en Europe de l'Est, d'importants stocks d'armes ont été dispersés par une partie de l'ancien appareil d'Etat. Et ces armes ont été rependues partout.

Ainsi, entre 1982 et 1992, 32 milliards de dollars d'armes ont été ainsi dérobés dans la seule Ukraine... Parmi les autres pays accusés de légèreté en ce domaine, figurent l'Algérie, l'Inde et le Pakistan.

De plus, une partie des armes illégales provient de vols ou de pertes ; environ un million d’armes sont perdues ou volées chaque année, y compris par des forces de sécurité internationales. Il s'agit de la source principale des armes de la criminalité (braquage…)


La mondialisation économique et surtout la dérégulation ont facilité les trafics internationaux pilotés par les paradis fiscaux, les sociétés écrans, et autres  trafiquants internationaux plus souples et mobiles que les polices nationales. Ceux là sont souvent à l’origine de la propagation des armes.

En outre, des troupes de l'ONU ont été impliquées dans ce trafic, au Congo et ailleurs, reversant les armes collectées aux combattants désarmés.
Il en résulte que, mêmes sous embargo, les pays ou des groupes détiennent et achètent des armes.
Fort de tout ce qui précède, à quoi servent les embargos sur les armes aujourd’hui ?
Quelle est la réalité des embargos sur les armes aujourd’hui ?
Le résultat est décevant car, entre 1997 et 2007, les Nations-Unies ont imposé 13 embargos sur les armes, tous ont été enfreints, en raison  des moyens insuffisants des  missions d'enquêtes et de contrôles.

Dans ces conditions, comment résoudre efficacement la fourniture illicite des armes en période de crise et qui devient de plus en plus préoccupant ?


Quelle solution durable ?

Certaines mesures  existent, mais nécessitent d’être renforcées.
En juillet 2000, l'industrie mondiale du diamant a clairement annoncé à la Communauté internationale sa politique de tolérance zéro envers les diamants de la guerre.
Fermement engagée dans l'éradication de ce trafic, l'industrie a collaboré étroitement avec les Nations Unies, des gouvernements et des organisations non gouvernementales (ONG) telles que Global Witness et Partnership Africa Canada pour créer le Système de Certification du Processus de Kimberley. Formellement adopté en 2003, ce système empêche les diamants de la guerre de pénétrer la chaîne d'approvisionnement diamantaire légitime. L'industrie du diamant a également adopté un Système de Garanties volontaire pour rassurer les consommateurs sur le fait que leurs diamants ne servent pas à financer des conflits armés.

Le processus de Kimberley est un régime international de certification des diamants bruts signé le 1er janvier 2003 par une trentaine de pays, afin de lutter contre les « diamants de sang », utilisés fréquemment (cas de la Sierra Leone notamment) comme monnaie d'échange contre des armes illégales. L'accord est le résultat de discussions ayant débuté en mai 2000 à Kimberley (Afrique du Sud).

Aujourd'hui, 71 gouvernements ont consacré le Système de Certification du Processus de Kimberley au sein de leurs législations nationales, et plus de 99 % de la production mondiale de diamants est désormais certifiée comme ne provenant pas de pays en guerre. Cependant, même un seul diamant de la guerre en circulation est un diamant de trop. C'est pourquoi l'industrie du diamant continue à coopérer avec les gouvernements, les ONG et l'ONU afin de renforcer le Processus de Kimberley et le Système de Garanties.
Bien que des diamants aient servi à financer des guerres, le problème ne réside pas dans les diamants en soi, mais dans les groupes rebelles qui en tirent parti (aux côtés d’autres ressources naturelles) pour atteindre leurs objectifs illicites. La grande majorité des diamants provient de pays en paix. Ces pays ont pu investir les revenus générés par les diamants dans le développement des infrastructures, des écoles et des hôpitaux pour le bien des communautés vivant dans les zones où les diamants sont extraits. Ces pays incluent l’Australie, le Botswana, le Canada, la Namibie, la Russie, l’Afrique du Sud et la Tanzanie.

Le 1er décembre 2000, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté à l'unanimité une résolution sur le rôle des diamants dans les conflits, tendant à briser le lien entre le négoce illicite des diamants bruts et les conflits armés afin de contribuer à la prévention et au règlement des conflits (A/RES/55/56).
 
À cette occasion, l'Assemblée a reconnu que le trafic de diamants contribuait de façon déterminante à prolonger des conflits sanglants dans certaines régions de l'Afrique, tout en soulignant que le commerce de diamants provenant de sources légitimes, concourait à la prospérité et au développement dans d'autres parties du continent.
En l’an 2000, le Conseil de Sécurité des Nations Unies a interdit les importations directes et indirectes de diamants bruts en provenance de la Sierra Leone et à destination des Etats membres afin de favoriser la stabilisation du pays et d’empêcher l’accès des rebelles aux devises étrangères et aux armes.
Il faut sensibiliser la Communauté internationale à la nécessité de supprimer les sources de financement des mouvements rebelles pour promouvoir une paix durable dans les pays en crise.

En cas de crise, il appartient aux gouvernements, aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales, aux marchands de diamants, aux Institutions financières, aux fabricants d'armes, aux services sociaux et éducatifs et à d'autres acteurs de la société civile, de conjuguer leurs efforts, et exiger la stricte application des sanctions et encourager l'instauration d'une paix véritable.
Il faut lutter contre le commerce de diamants de guerre.

Cependant, comment peut-on distinguer un diamant de la guerre d'un diamant provenant d'une source légitime?
Ce n’est pas facile car les trafiquants prennent des précautions visant à dissimuler la provenance des Diamants.
Mais, un système de certificats d'origine bien conçu peut être un moyen efficace de veiller à ce que seuls les diamants provenant de sources légitimes, c'est-à-dire de zones contrôlées par le gouvernement, soient vendus sur le marché. Pour qu'un tel système fonctionne de façon satisfaisante, il faut que parallèlement, les États membres et l'industrie du diamant s'engagent notamment à harmoniser les certificats entre les pays exportateurs de diamants, à assurer la transparence, le contrôle et le suivi du régime et à adopter de nouvelles dispositions législatives à l'encontre des contrevenants.

Quelles perspectives d’avenir ?
Selon des sources de  Diamond facts.org, il existe des perspectives novatrices.
D’une part, le Processus de Kimberley est constamment réétudié afin de l’améliorer. Actuellement, ce sont les gouvernements internationaux, membres du Processus qui effectuent ces révisions, avec la contribution d’ONG, d’experts de l’industrie du diamant et d’autres parties prenantes. Plus de 60 recommandations pour l’amélioration du processus ont déjà été proposées, et celles qui ont été validées seront adoptées ultérieurement, avant d’être formellement ratifiées par l’Assemblée Générale des Nations Unies.
D’autre part, outre le Processus de Kimberley et le Système de Garanties, l’industrie du diamant, en coopération avec des gouvernements et des ONG – prend des mesures supplémentaires pour éradiquer les diamants de la guerre. Par exemple, la DDI (Diamond Development Initiative) vise à définir des méthodes viables pour garantir que les diamants sont extraits et distribués au profit des communautés locales et des gouvernements nationaux.


 

Publié dans Politique africaine

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A
Bel article,
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D
<br /> merci pour le compliment, l'essentiel que vous soyez satisfait       denis zodo<br /> <br /> <br />
I
les états qui sont sous l'embargo, trouvent toujours les voies détournées pour avoir des armes. c'est un vrai problème pour les pays en conflits à traves le monde
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D
<br /> <br /> malgré l'embargo , ces états voyous trouvent des voies détournées pour avoir des armes. c'est une méthode qui est connue .tu me donnes du diamant ou du petrole et , je te livre les<br /> armes.l'embargo c'est de la poudre aux yieux. merci de votre visite<br /> <br /> <br /> <br />