Laurent Nkunda : le tueur doit payer

Publié le par Denis-Zodo

                            

Laurent Nkunda, de son vrai nom, Nkunda Mihigo, est un officier rebelle tutsi de l’armée de la République démocratique du Congo, né le 2 février 1967. Il fut des études en psychologie, mais s’est vite détecté des talents de militaire, c’est-à-dire dans le métier des armes. Il se formera aux côtés de Paul Kagamé, alors chef du Front patriotique rwandais (FPR), et  aujourd’hui Président du Rwanda dans les années 1994, date du génocide dans ce pays. Mais très vite, en 1998, il rejoint le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) repéré dans l’est de la RDC. Depuis 2004, il est à la tête d’une rébellion dans cette même partie du pays. Son mouvement, le conseil national pour la défense du peuple (CNDP), soutenu de tout temps par le Rwanda contre le gouvernement congolais, accusé de soutenir les rebelles hutus rwandais qui s’appuient sur la RDC pour mener des attaques en territoire rwandais. En 2008, il a même appelé avec son mouvement, à renverser le Président Joseph Kabila. Mais à l’évocation de son nom, ce que l’on retient tout de suite, ce sont les crimes que ce seigneur de guerre a commis dans ce vaste pays, précisément dans le Nord Kivu.

En septembre 2005, un mandat d’arrêt international a été lancé contre lui, accusé qu’il était, d’avoir perpétré de nombreux crimes de guerre et crimes contre l’humanité dont des massacres, actes de torture, viols). Mais Laurent Nkunda ne sera jamais arrêté. Refusant de rejoindre l’état-major intégré de l’armée nationale congolaise, il tente de déstabiliser l’est du pays pendant la présidentielle de juillet 2006 et à la fin de cette année, après avoir comme nous l’écrivions plus haut, semé la violence lors de la transition politique entre 2003 et 2006, avec l’attaque de Bukavu en 2004 et les attaques de plusieurs villes dans le territoire de Rutshuru, dans la province du Nord Kivu en janvier 2006. Il s’est même permis, avec un des responsables du RCD Goma en 2002, d’enlever et de battre deux gardes des Nations Unies, dans les locaux de cette Institution dans cette partie du pays, parce que celle-ci venait d’ouvrir une enquête sur des tueries massives à Kisangani. Début décembre 2007, Nkunda avait massacré les soldats gouvernementaux qui tentaient d’attaquer son fief. Il semble que l’opération qui devait être menée conjointement par les forces gouvernementales et les casques bleus de l’ONU ait échoué par la faute d’un colonel indien Chand Saroha, commandant à ce moment là les troupes onusiennes au Nord Kivu. En août 2008, il a lancé une offensive visant à agrandir sa zone de contrôle dans le Nord Kivu.

 

                                                    Lâché par les siens

 

Autant le Front de libération du Rwandais (FDLR) constitué de maquisards hutus rwandais était soutenu par la RDC contre le régime de Kagamé, autant le CNDP de Nkunda était soutenu et financé par le Rwanda contre le pouvoir de Kinshasa. Mais au bout du compte, et le pouvoir de Kigali, et celui de Kinshasa ont sacrifié ces soutiens pour ne voir que leurs propres intérêts. Tous deux militaires, Paul Kagamé et Joseph Kabila savent les forces et les limites des armes. Ils ont tous deux devenus de vrais hommes politiques, prêts à troquer leurs treillis militaires contre les costumes huppés de politiques. C’est ainsi qu’ils se sont entendus, pour se débarrasser de leurs “deux forces“, devenues au fil du temps, une épine au pied. Kigali et Kinshasa décident alors de mener une opération conjointe contre ces deux mouvements rebelles. Et c’est dans sa fuite vers le Rwanda que l’homme a été arrêté par des éléments des Forces rwandaises le vendredi 23 janvier 2009. D’ailleurs, il était affaibli par la défection des principaux commandants de son mouvement, avec à leur tête le général Bosco Ntaganda qui a rallié le 16 janvier2009, la coalition des armées du Rwanda et de la RDC. C’est le fruit de l’accord scellé entre les deux capitales. Un accord aux clauses secrètes signé le 5 décembre entre le Rwanda et la RDC, puis consacré par l’annonce de la “fin de la guerre“ par le CNDP alors commandé par le nommé Bosco Ntaganda. La RDC et le Rwanda se serait alliés contre les rebelles hutus et tutsis du Kivu, parce qu’ils refusent que lesdits groupes, par eux financés autrefois, soient émancipés. Kinshasa et Kigali voudraient aussi se partager les nombreuses richesses de cette région du Congo, sans avoir affaire à la convoitise des deux groupes rebelles.

Comme quoi, Nkunda l’apprend à ses dépends, tout comme le FDLR qui sauront désormais que seuls, les intérêts priment dans une telle situation où c’est la politique qui est au centre des choses. “Il n’y a pas d’amis en politique, il n’y a que des intérêts“, dit-on. Par contre, Bosco Ntaganda lui, en aurait bénéficié puisqu’une mission congolaise aurait été envoyée à La Haye, pour tenter d’obtenir que la Cour pénale internationale gèle les poursuites pour crimes de guerre contre ce dernier, surnommé “Terminator“, pour les crimes commis par ses troupes dans l’est du Congo.

Mais pour l’heure, attendons de voir, puisque le Rwanda n’a pas encore répondu à la sollicitation de Kinshasa qui souhaite que Nkunda soit extradé vers la RDC. Le Rwanda fera t-il diversion ou s’exécutera t-il ? Ou encore prendra t-il attache directement avec la CPI ? C’est une question à se poser.

Quant à Thomas Lubanga, chef de l’Union des patriotes Congolais (UPC), une faction rebelle installée au Nord-est de la RDC, il est depuis le lundi 26 janvier 2009 devant la CPI pour répondre des accusations de crimes commis devant cette Cour, après son arrestation il y a de longs mois. Le procès devrait durer entre six et huit mois.

 

Publié dans Politique africaine

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