Côte d’Ivoire : le racket policier se poursuit, contre vents et marrées

Publié le par Denis-Zodo

Certains avaient prédit un coup d’épée dans l’eau. Nous voulons parler de l’œuvre titanesque engagée l’année dernière par la hiérarchie des Forces de défense et de sécurité de Côte d’Ivoire, pour enrayer le racket sur les routes ivoiriennes, parce que selon des études menées par la Banque mondiale, les investissements dans le pays en prennent un sérieux coup. En somme, le racket est un frein au développement économique des pays. Si bien que les Institutions de Bretton Woods (Banque mondiale, Fonds monétaire internationale) en font une condition sine qua non dans l’aide accordée aux pays en développement, généralement exposés à de telles pratiques. Mais l’année dernière, comme pour dire que leurs actions étaient sérieuses et ne pouvaient s’arrêter en si bon chemin, le chef d’état-major des Forces de défense et de sécurité(FDS), le général Philipe Mangou et le commissaire du gouvernement, le colonel Ange Kessi Kouamé, avaient fait mettre en place une cellule de suivi, composée de membres de syndicats des transports, d’associations de consommateurs, de la société civile et de responsables de la police, de la gendarmerie et de l’armée. Ce groupe d’hommes et de femmes avait alors sillonné la zone sous contrôle gouvernementale, pour sensibiliser les agents des FDS postés sur les routes dans le cadre des contrôles routiers. Des agents véreux, on le sait, pris la main dans le sac, ont souvent même été arrêtés puis jugés et conduits à la prison militaire. Mais rien n’y fit. Autant certains banalisaient l’euphorie autour de cette action, comme pour dire qu’elle n’irait pas loin, autant des agents sur les routes donnaient dans la défiance, comme pour dire que Mangou et Ange Kessi, leurs supérieurs militaires, n’étaient pas à même de mener ce combat. Ils n’avaient certainement pas tort. Du moins si l’on s’en tient aux réalités du moment. Car, le constat sur le terrain à l’heure actuelle, est amer. Doublement amer. C’est comme si rien n’avait changé dans la pratique des agents commis aux contrôles dans les barrages routiers. Les transporteurs dans le district d’Abidjan recommencent à se plaindre. Lorsqu’ils sont sifflés par les policiers ou les gendarmes aux différents points de contrôle, les conducteurs sont obligés de mettre la main à la poche, au risque de voir confisquer les pièces de leurs véhicules, souvent pour des raisons infondées. Et pendant ce temps, les voyageurs attendent, impatients, dans les véhicules de transport en commun. Ce qui oblige les conducteurs à sortir l’argent qui varie entre 500 CFA (moins d’un euro) à 200 FCA, selon le corps (gendarmerie et police) concerné, pour éviter les complaintes de ses clients. On peut dire que c’est un retour à l’ancien système. Les mesures de la hiérarchie militaire n’ayant duré que le temps d’un feu de paille. Ici en Côte d’Ivoire, on aime les actions d’éclat. Cela, les agents l’ont compris. Il s’est agi pour eux d’entrer dans les rangs, de laisser le temps au temps, comme on le dit ici en Côte d’Ivoire. De laisser les initiateurs de ce « coup de balai » déposer leur balai et s’occuper d’autre chose. Avant que ne reprenne la honteuse besogne, insidieusement. Ce qui fut fait. Aujourd’hui, les barrages routiers anarchiques ont refait surface. Aux yeux et à la barbe des décideurs nationaux que sont les chefs militaires ivoiriens. Or donc, ils avaient raison, ceux qui estimaient que la décision de Mangou et Ange Kessi n’irait pas loin. « En Côte d’Ivoire, on commence les choses sans les terminer  ». Cette idée, tous les Ivoiriens en font siennes. Mais croyez nous, toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire ; mais celle là est une vérité apodictique. On entame les bonnes œuvres, mais la fin est toujours interrogation. On est chaque fois amené à se demander où on en est. Parce qu’en réalité, rien n’aura bougé. C’est hélas, le cas aujourd’hui en Côte d’Ivoire, avec la question du racket policier sur nos routes. Et nous l’écrivions lorsque la question battait son plein l’année dernière, que ce ne serait pas facile pour les Autorités militaires et policières de mettre fin à cette pratique. On l’a laissée prendre forme, puis s’enraciner sous les regards approbateurs de tous. Et aujourd’hui où elle a est encrée dans les comportements, on veut la retirer. Toute chose qui semble rencontrer une farouche opposition des mis en cause. C’est comme le disait quelqu’un, du sucre qu’on laisse dans la bouche d’une personne durant de longs moments, et qu’on prétend retirer. Le racket est devenu une habitude sur les routes ivoiriennes, pas parce que les agents ne reçoivent pas de salaire, mais parce qu’il leur colle à la peau tout simplement. Ils ne s’imaginent pas un jour sans ce sucre à la bouche. Et eux-mêmes le disent à qui veut l’entendre. « Peut-être qu’un beau jour ça va s’arrêter, mais ce n’est pas pour maintenant », défient-ils. Comme pour dire que ceux qui gouvernent en font plus. « Et pourquoi pas nous ? ». Véritable problème à surmonter que celui du racket. Il est surtout pratiqué par les hommes en treillis, mais il ne faut pas occulter d’autres secteurs qui s’en adonnent à cœur joie. Le combat doit être général. C’est bien aux gouvernants que nous nous adressons.  

Publié dans société

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