Miriam Makeba : disparue mais pas morte

Publié le par Denis-Zodo

A l’état-civil, elle se nommait Zenzile Makeba Qgwashu Nguvama Yikketheli. Mais plus connue sous le nom de Miriam Makeba. Née le 04 mars 1932 à Soweto de parents Transkei, elle est décédée d’une crise cardiaque dans la nuit du dimanche 09 au lundi 10 novembre 2008, près de Naples en Italie, après un concert en soutien à Roberto Saviano, l’auteur d’un film, menacé de mort par la Mafia. A 76 ans, c’est une voix militante qui disparaît sans toutefois dire adieu. Car, ses œuvres continueront aussi longtemps que possible de bercer l’Afrique du Sud, son pays, l’Afrique et le monde entier. A l’instar de Nelson Mandela qui s’est battue politiquement pour sortir son pays de l’apartheid, Makeba a joué sa partition sur le plan artistique pour que soit reconnu le droit des peuples noirs. Après son retour d’exil dans son pays natal en 1991, suite à la libération de Mandela, Miriam Makeba vivait jusqu’à sa disparition, dans une ferme agricole, non loin de la capitale sud-africaine. Avec ses arrière petits-enfants. « Quand je suis revenue en Afrique du Sud dans les années 90, j’ai cherché un endroit où vivre. Et j’ai trouvé cette parcelle de 3 hectares. J’y ai des vaches, des chèvres, et je m’y sens bien (…) », déclarait-elle au cours d’une interview réalisée en août 2007 par la SABC News International.

 

                                             Une vie et une carrière mouvementées

 

Son père, Caswell Makeba, est mort alors qu’elle était toute jeune. Sa mère, Nomkondela fit de la contrebande d’alcool pour élever ses enfants et récolta six mois de prison. Alors qu’elle était interdite d’études par le Bantou Education Act, elle débute boyesse à Pretoria, avant de rejoindre comme chanteuse son cousin Zweli dans le groupe des Cuban Brothers à Johannesburg. Elle passe chez en 1952 chez les Manhattan Brothers et c’est là qu’elle trouve son prénom Miriam. En 1956, elle écrit et enregistre « Pata Pata », le plus grand succès de sa carrière ; chanson reprise par plusieurs auteurs. En 1959, elle s’engage avec l’African Jazz and Variety, groupe populaire dans lequel officiait le trompettiste Hugh Masekela qu’elle épousera cinq ans plus tard et interprétera ses chansons, telles Soweto Blues ou Meeting at the River. Cette même année de 1959, elle a 27 ans ; et c’est l’année que le destin choisit pour frapper à sa porte. Elle participe à un film anti-apartheid, “Come back to Africa”. L’artiste est alors frappée d’ostracisme dans son pays. Elle s’exile en Guinée, ce pays d’Afrique de l’ouest, dirigé par un certain Ahmed Sékou Touré qui venait de dire non à l’impérialisme blanc en 1958. Cet exil forcé l’empêche de revenir au pays, assister aux funérailles de sa mère. Mais plus, sa musique est interdite dans son pays, l’Afrique du Sud. Durant 31 ans, elle va vivre loin de son pays, avec un titre de citoyenneté honoraire dans dix pays dont la France, l’Algérie, la Tanzanie…Mais en 1961, elle connaît une ascension éclair. Elle participe à l’hommage rendu au Président Kennedy pour son anniversaire. « J’étais la seule Africaine au milieu des grands artistes américains : Marlon Brando, Marilyn Monroe, Harry Belafonte, Diane Keaton…Moi seule parmi ces géants », racontait-elle. En 1963, à la fête de la naissance de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à Addis Abeba, elle chante une chanson éthiopienne. Ceux qui l’observent avec attention sont Haïlé Sélassié, Kwamé Nkrumah, Houphouët-Boigny, Habib Bourguiba, Sékou Touré et bien d’autres. La même année, à la tribune des Nations Unies, puisqu’elle y représentait peu après la Guinée dont elle avait acquis la nationalité, elle condamne sans autre forme de procès l’apartheid. « Je vous demande d’user de toute votre influence afin que s’ouvrent les portes de toutes les prisons et des camps de concentration d’Afrique du Sud. Le régime de Verwoed a transformé mon pays en une gigantesque prison… », s’était-elle indignée. En 1985, elle est faite Chevalier des Arts et Lettres parla France. Deux ans plus tard, soit en 1987, elle connaît un nouveau succès mondial en participant à l’album « Graceland » de Paul Simon, alors qu’elle vit en Belgique. En 1990, elle vient d’obtenir la nationalité française. Mais Nelson Mandela qui sort de 27 années de prison, finit par la persuader de revenir au pays. Dans un film « Sarafina » qui raconte les émeutes de Soweto en 1976, Makeba fait son apparition en 1992. C’est en 2000 que Miriam Makeba sort un nouvel album. « Homeland », un disque qui raconte sa joie d’être rentrée dans son pays. « J’ai conservé ma culture, j’ai conservé la musique de mes racines. Grâce à elle, je suis devenue cette voie et cette image de l’Afrique et de son peuple, sans même en être consciente », avait écrit dans son autobiographie, celle qu’on appelait affectueusement, « l’impératrice de la chanson africaine ».

En Côte d’Ivoire où elle est passée à plusieurs reprises, elle avait fait une émule en la personne de la chanteuse Aïcha Koné qui avait reçu son onction en 1978. Au cours de ce voyage, elle avait été reçue avec faste par le premier Président de la République Houphouët-Boigny qui prônait contrairement à ses pairs, le dialogue pour la résolution de cette crise.    

Parmi ses distinctions, on peut citer le Grammy Award, partagé en 1965 avec le chanteur noir américain Harry Belafonte pour leur disque commun, intitulé « An evening with Harry Belafonte and Miriam Makeba ». Une distinction dont elle est la première femme noire à obtenir.

Avec une discographie et une cinématographie bien remplies, on peut dire que « Zenzi » n’a pas vécu inutilement. Elle a certes participé au développement de la culture africaine, mais elle a également mené à sa façon, le combat pour « la libération de l’homme noir ». Heureusement qu’elle a vu un Noir accéder au pouvoir aux Etats-Unis d’Amérique, avant de tirer sa révérence. On peut donc dire qu’elle est partie, satisfaite d’avoir joué sa partition dans la lutte pour l’égalité des races. Merci « Mama Africa ». Tu pars certes, sans partir réellement. Car, en même temps que tu sembles partir, tes œuvres discographiques et cinématographiques te ressuscitent. A bientôt donc, et non Adieu !

 

Publié dans culture

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C
Bel article Monsieur ZODO SUR MYRIAM MAKEBA EH OUI LES ARTISTES MEURENT MAIS NE DISPARAISSENT PAS C EST LEUR SUPERIORITE SUR NOUS ...........
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D
<br /> <br /> Bonjour Madame Lallart<br /> <br /> <br /> Merci pour votre compliment, nous essayons de satisfaire l'attente de nos visiteurs et visiteuses. Vous me permettrez de vous empreinter votre phrase:"les artistes meurent mais ne disparaissent<br /> pas, c'est leur supériorité sur nous." Oui l'art ne peut se pérenniser que s'il vit.<br /> <br /> <br /> Cordialement Denis Zodo<br /> <br /> <br /> <br />